Audrey-Anne Veillette: un bon exemple de persévérance
Lorsque j’étais petit, il y avait une série de livres pour enfants qui s’appelait L’une des belles histoires vraies dans laquelle on mettait de l’avant un trait de caractère d’une personnalité. Par exemple, Un bon exemple de courage, Jackie Robinson raconté aux enfants. Ou un bon exemple de ténacité pour parler de Maurice Richard. Si la série existait encore, on pourrait facilement en faire un qui s’intitule: Un bon exemple de persévérance, l’histoire d’Audrey-Anne Veillette.
Alors qu’elle venait de connaître une saison extraordinaire dans les rangs universitaires avec les Carabins de Montréal, établissant un record d’équipe pour le nombre de buts marqués en une saison et étant choisi la joueuse la plus utile à son équipe, Audrey-Anne signe un contrat avec la Force de Montréal, l’équipe professionnelle de hockey féminin de la grande région métropolitaine dans la Premier Hockey Federation (PHF). Toutefois, un mois plus tard, à la fin du mois de juin 2023, le propriétaire des Dodgers Mark Walter achète et dissout la PHF, afin de fonder une toute nouvelle ligue, la Ligue professionnelle de hockey féminin (LPHF). Tous les contrats signés dans la PHF sont donc annulés, incluant bien évidemment celui de Veillette.
Comme quoi un malheur n’arrive jamais seul, quelques semaines plus tard, elle se blesse à un genou, blessure qui lui fera manquer au final plus d’un an d’activités.
Toutefois, en septembre 2023, la LPHF présente son tout premier repêchage et Ottawa repêche Audrey-Anne avec l’avant-dernier choix, le 89e au total. L’équipe connaît l’état de santé d’Audrey-Anne, mais décide de la repêcher quand même. Mais au camp d’entraînement deux mois plus tard, étant donné qu’elle ne pouvait toujours pas jouer, l’équipe décide de la libérer. Aucune autre formation ne la repêche étant donné sa blessure, anéantissant les plans d’Audrey-Anne de jouer chez les professionnels pour la saison 2024.
Une deuxième chance à Ottawa
Tout comme son jeu sur la patinoire, elle redouble d’efforts dès que les médecins lui permettent de débuter sa réhabilitation. Audrey-Anne travaille excessivement fort en gymnase et évidemment, dès que possible, recommence à s’entraîner sur la patinoire. Si bien qu’au printemps 2024, Ottawa lui offre un contrat de réserviste afin qu’elle puisse gagner un certain salaire et profiter de l’équipe médicale et des installations que la Charge d’Ottawa peut lui fournir.
« Quand elle a commencé à patiner en mars ou en avril, nous voulions vraiment qu’elle revienne », a dit le directeur général de la Charge d’Ottawa, Michael Hirshfeld, à Verdun cette semaine dans le cadre du mini-camp de la LPHF. Nous l’avons vraiment aimée quand nous l’avons repêchée, nous avons vraiment aimé ce qu’elle a apporté dans le vestiaire, nous l’aimons en tant que personne, alors nous voulions lui donner l’occasion de se réhabiliter avec nous. »
Joueuse autonome au cours de l’entre saison, la Victoire de Montréal et sa directrice générale, Danièle Sauvageau, qui connaît bien Audrey-Anne puisqu’elle l’a vue à l’œuvre de près avec les Carabins, lui offre une invitation à son camp d’entraînement. Hirschfeld lui offre également une invitation. Reconnaissante qu’Ottawa lui ait offert un contrat de réserviste au printemps pour qu’elle puisse continuer sa réhabilitation, elle décide d’accepter l’invitation d’Hirschfeld.
De retour devant ses parents
Et comme si Audrey-Anne avait elle-même écrit sa propre histoire, le sort a voulu que son premier match compétitif depuis le 19 mars 2023 se déroule à Montréal, à l’Auditorium de Verdun où elle s’est entraînée pendant de multiples heures au cours de sa carrière. C’est devant, entre autres, ses parents qu’elle a effectué son retour jeudi dernier alors qu’Ottawa jouait contre le Fleet de Boston lors du mini-camp de la LPHF.
Avec à ses côtés Shiann Darkangelo et Natalie Snodgrass, Audrey-Anne s’est fort bien tiré d’affaire et dès les premières minutes, sur le premier but de son équipe, elle a obtenu une mention d’aide. De quoi lui donner toute la confiance nécessaire et lui enlever beaucoup de pression.
« Je suis fière de moi! Ça fait un an et demi que je n’ai pas joué, alors je suis très contente de ce premier match », a dit Veillette après le match.
Elle a connu un fort match utilisant son gabarit pour jouer un peu plus physique, elle qui jouait dans un contexte de mise en échec pour la toute première fois, une facette du jeu qu’elle a particulièrement aimée.
« Je ne pensais jamais dire ça dans ma vie, mais j’ai vraiment aimé ça. Ça donne une petite rage, tu peux donner une mise en échec et c’est toléré, alors on va jouer physique! »
Elle a également joué en désavantage numérique grâce à cette nouvelle règle du No Escape Rule, alors qu’à deux reprises, elle était sur la patinoire lorsqu’une de ses coéquipières a reçu une pénalité. Jouer en désavantage numérique n’était pas une facette du jeu qu’Audrey-Anne était appelée à faire régulièrement avec les Carabins. Mais elle a tout de même pris plaisir à le faire et s’est fort bien débrouillée, coupant des passes, désageant son territoire et bloquant des tirs au moment opportun.
« C’est un autre rôle que celui que j’avais avec les Carabins et je vais le prendre. Je vais prendre tout ce qui passe en fait. On s’était pratiqué la semaine passée alors ce n’était rien de nouveau et je pense que ça s’est bien passé. »
Seul bémol, sa rapidité. Reconnue pour son tir et son coup de patin dans les rangs universitaires, on a quelque peu senti de la fatigue dans son jeu plus le match avançait, particulièrement en troisième période, où elle semblait un peu plus lente qu’en début de rencontre. Ce qui est tout à fait normal. Il s’agissait de ses débuts chez les professionnels, le plus haut niveau auquel elle n’a jamais joué et elle l’a fait plus de 614 jours après son dernier match.
Jouer avec Serdachny
Lors de la deuxième rencontre face à la Victoire de Montréal de surcroît, c’est sur un deuxième trio que l’entraîneuse-chef Carla MacLeod a décidé de la placer aux côtés du choix de première ronde de l’équipe au repêchage de 2024 et celle qui a marqué le but en or pour Équipe Canada lors des plus récents championnats mondiaux, Danielle Serdachny, ainsi que de la multiple championne mondiale Emily Clark. Un vote de confiance, certes, mais également un test afin d’évaluer pleinement les capacités et le rôle qu’Audrey-Anne pourra avoir avec l’équipe. Jumelé au trio de Marie-Philippe Poulin et à la suite d’une défaite de 6 à 3, elle s’en est tout de même bien sortie avec une fiche de plus-1 et quelques bonnes chances de marquer.
« Ce que je remarque c’est la constance dans son jeu et évidemment, son excitation, a mentionné Carla MacLeod après la rencontre de vendredi. Quelle histoire! Si vous vous arrêtez et que vous faites une pause, quelle histoire de persévérance! Son état d’esprit est impressionnant pour une jeune femme. Elle va continuer à faire de grandes choses dans la vie. Vous pouvez juste le voir dans sa personnalité. Nous sommes impressionnés par son éthique de travail et sa détermination à revenir au jeu de cette façon. »
S’il n’y a pas de place, je vais en faire une!
L’équipe a 12 attaquantes déjà sous contrat. Mais quatre d’entre elles ont des contrats non garantis. Et le directeur général de l’équipe a été très clair à ce sujet. Ce n’est pas parce qu’une joueuse a un contrat qu’elle va nécessairement jouer avec l’équipe.
« Je m’en vais là pour faire ma place, s’il n’y en a pas, je vais en faire une. C’est ma mentalité! »
Ce qui veut dire deux choses dans le cas d’Audrey-Anne Veillette. Soit qu’elle a impressionné suffisamment la direction pour se faire offrir un contrat régulier, soit qu’on lui offrira un contrat sur la liste des réservistes. Si c’est le cas, une autre équipe pourrait à ce moment-là acquérir les droits sur l’attaquante.
Personnellement, j’ai de la misère à croire qu’elle ne revêtira pas un uniforme de la LPHF cette saison et fort probablement que cet uniforme sera celui de la Charge d’Ottawa. Elle est une attaquante de puissance qui ne va qu’améliorer son jeu au fur et à mesure que la saison va avancer et au fur et à mesure que sa rapidité va redevenir l’une de ses marques de commerce.
Ce sont dans les prochains jours que nous saurons exactement le sort d’Audrey-Anne Veillette dans la LPHF, alors que les équipes doivent remettre leur alignement final mercredi prochain.
crédit photo: LPHF